Un petit nid de verdure au cœur de la capitale
Comme l’a si joliment chanté en 1972 Jacques Dutronc : « C’était un petit jardin… Qui sentait bon le Bassin parisien… ». Situé dans le seizième arrondissement de Paris, cet espace d’environ 350 mètres carrés, forme un U autour d’un immeuble de quatre étages. Je l’ai transformé en écrin de verdure car pour moi, en ville, un jardin doit être un confetti de nature pour vivre heureux…
Avec mon équipe d’Horticulture & Jardins, nous avons réalisé ce jardin privatif de l’appartement situé au rez-de-chaussée d’un immeuble, en même temps que s’effectuaient les travaux d’aménagement intérieur.
Cette famille avec enfants souhaitait un jardin de style plutôt naturel pour faire oublier la ville et un aménagement qui réclame un minimum d’entretien. Pour accentuer l’impression d’intimité et constituer un lieu de vie totalement déconnecté de l’environnement très bétonné alentour, j’ai opté pour une végétation dense et variée, insistant notamment sur une plantation généreuse tout au long des 6 m de façade qui donnent sur la rue.
Un lieu de vie chaleureux pour l’extérieur
Le terrain repose partiellement sur une dalle car un garage a été construit en sous-sol. J’ai fait éliminer le dallage en pierre d’origine, dont le niveau était décalé par rapport à celui de l’appartement, pour le remplacer par une terrasse en lames de bois qui se retrouve désormais de plain-pied avec l’habitation.
La grande terrasse en bois constitue le centre vital du jardin. C’est comme un « hub » par lequel on passe obligatoirement pour aller de l’appartement au jardin et vice versa, mais aussi une zone paisible pour la réception, le partage et le repos. Matériau qui offre un contact agréable, facile à travailler et qui s’accorde avec tous les styles d’architecture, j’utilise souvent le bois dans mes jardins, optant selon les budgets pour du pin autoclavé (c’est le cas ici) ou de l’ipé.
Le bois offre aussi l’avantage de se ressuyer très vite, d’autant que nous laissons des joints libres entre les lames pour faciliter l’écoulement de l’eau. On peut ainsi traverser la terrasse par temps de pluie sans avoir les pieds trempés.
La terrasse est bien sûr agrémentée de potées qui peuvent être déplacées et plantées à loisir pour modifier le décor au gré des saisons et de ses envies. Elle accueille un salon de jardin avec une table et des fauteuils confortables pour des moments d’échange ou des repas en plein air.
Pour vivre heureux, vivons cachés sous la pergola
À l’extrémité de la terrasse, nous avons installé une pergola, elle aussi en bois. Elle casse la vue d’origine qui donnait sur l’imposant immeuble voisin. La pergola constitue aussi la structure d’une pièce d’extérieur qui, en cadrant le regard offre dès lors, un panorama intéressant sur le jardin.
Aujourd’hui, c’est devenu un espace d’intimité très appréciable, souvent utilisé par les propriétaires pour le repas ou la réception.
Une petite touche d’exotisme
Je plante couramment des végétaux méditerranéens dans mes jardins en ville. On observe en effet, dans Paris intra-muros par exemple, des microclimats très favorables liés à l’omniprésence de bâtiments qui constituent d’excellentes protections thermiques. La différence de température entre la banlieue et le cœur de ville est de minimum 2 °C, mais elle atteint couramment 4 °C.
J’ai planté dans un grand pot en résine un superbe mimosa (Acacia dealbata) qui, après 3 ans de plantation (moment où les photos du reportage ont été réalisées), mesurait déjà plus de 7 m de haut. La situation abritée de ce jardin permet d’espérer que cet arbre, qui supporte des périodes passagères de gel jusqu’à -7 °C, prospérera durant de nombreuses années.
Il en est de même pour une plante goupillon Callistemon citrinus ‘Splendens’, aux superbes inflorescences printanières d’un rouge vif éclatant. Plus frileux que le mimosa, il nécessitera à chaque alerte de gel, la pose d’un voile d’hivernage. Avec cet arbuste d’origine australienne, mieux vous suivre régulièrement la météo. C’est aussi pour cela que cet arbuste nommé aussi « rince-bouteilles » se trouve dans un contenant design en résine. Cela me permet aussi d’utiliser un substrat approprié et dont le drainage a été renforcé.
Des plantations denses pour s’isoler du bruit et des voisins
Très végétalisé, le pourtour du jardin compose une sorte d’écrin protecteur à l’encontre du bruit et des regards indiscrets. Un bosquet de bambous (Phyllostachys aurea) est doublé par une « forêt » de gommiers bleus (Eucalyptus gunnii), deux essences réputées pour leur croissance rapide Lorsqu’ils dépasseront 10 m de haut, soit environ 6 ans après leur mise en place, on obtiendra un véritable havre de nature qui fera oublier la ville.
Des arbres bien adaptés aux petits jardins
La végétation riche et variée est constituée d’arbres de petit développement, très bien adaptés à un usage en ville. J’ai notamment choisi l’arbre de fer (Parrotia persica), dont le feuillage devient multicolore en automne ; l’arbre de Judée à feuilles pourpres (Cercis canadensis ‘Forest Pansy’), conduit sur tige, poussant lentement, son feuillage est quasi persistant à Paris et un érable de l’Amour (Acer tataricum ssp. ginnala), naturellement érigé et arrondi, dont le feuillage rougit dès octobre. Pour compléter cette collection arborescente, deux espèces au feuillage toujours vert : le laurier-tulipier (Magnolia grandiflora) au feuillage foncé et brillant qui met bien en valeur les magnifiques coupes blanches parfumées de la floraison et, l’incontournable olivier (Olea europaea), dont quasiment tous les citadins sont aujourd’hui amoureux.
Les autres plantes qui composent ce jardin
J’ai souhaité dans ce jardin obtenir une ambiance foisonnante, d’inspiration libre, mais dont les silhouettes, les textures et les couleurs offrent une grande variété. J’ai donc ajouté aux plantes citées précédemment :
• Cheveux-de-vénus (Muehlenbeckia complexa). Buissonnante et rampante cette vivace néo-zélandaise porte des feuilles semi-persistante, coriaces, quasiment rondes, sur des tiges grêles qui s’enchevêtrent. Ces dernières s’enracinent naturellement (marcottage spontané) ce qui permet à la plante de se développer généreusement. Dans certaines conditions, elle peut même devenir envahissante.
• Cornouiller des pagodes panaché (Cornus controversa ‘Variegata’) c’est un splendide arbre caduc dont les feuilles vert clair sont marginées de blanc crème. Les branches se développent horizontalement, apportant un effet architectural de grand intérêt. Le feuillage panaché crée un effet lumineux très appréciable à l’ombre que cette essence apprécie tout particulièrement.
• Cornouiller à fleurs (Cornus kousa var. chinensis). Formant un grand arbuste ou un petit arbre de 3 à 6 m de haut, il doit être planté dans un sol acide, humifère et frais. Décoratif en toute saison, il porte en juin de fleurs étoilées aux grandes bractées couleur ivoire, suivies à l’automne de fruits rouges qui font penser à des fraises. Les teintes automnales du feuillage sont tout simplement somptueuses.
• Glycine de Chine (Wisteria chinensis), plantée sur l’une des extrémités de la pergola, cette liane peut prendre des proportions gigantesques, mais fort heureusement, elle se taille bien. Couvrant rapidement la structure en l’enroulant de ses tiges, elle procure une ombre légère par son feuillage composé très élégant. De fin avril à fin mai et parfois aussi en septembre, la glycine se pare de longues grappes bleues très parfumées qui en font une plante d’exception que j’utilise dès que je dois habiller une construction.
• Vigne de Coignet (Vitis coignetiae), c’est la seconde grimpante que j’ai utilisée pour couvrir la pergola. Désirant obtenir rapidement une tonnelle de verdure, j’ai choisi cette espèce japonaise à la croissance ultrarapide, dont les grandes feuilles prennent un coloris rouge orangé très spectaculaire en automne.
Ce jardin, qui, avouons-le, reste un lieu d’exception vu sa situation au cœur de la capitale, montre toutefois qu’il est possible de transformer des espaces enchâssés dans le béton en véritables petits paradis. Il suffit d’un peu d’imagination et d’une sélection rigoureuse des végétaux. Et cela, c’est l’incomparable apport que va vous offrir l’intervention d’un paysagiste.
Toutes les photos qui illustrent cet article sont disponibles sur : www.map-photos.com